Comme beaucoup d’entre vous sans doute, j’ai été frappé par la violence de
la campagne présidentielle. Cette violence a laissé derrière elle des séquelles
profondes, non seulement au sein des partis, rongés par les trahisons et les mensonges, mais aussi parmi les amis, ceux qui ne se parlent plus,
et parmi les familles elles-mêmes. Ces déchirements rappellent ceux de
l’affaire Dreyfuss, à ceci près que si Dreyfuss divisait l’opinion en deux
camps opposés, on assiste ici à un fractionnement en une multiplicité de groupes hostiles. Un
véritable poison s’instille dans la société, mélange de colère, de rancœur,
exacerbé en haine.
Les observateurs autorisés déplorent
que la campagne n’a été le lieu d’aucun débat de fond. Des questions pourtant
essentielles pour la gauche, comme la nature de l’UE, ou le contenu d’une
refonte démocratique des institutions politiques ont été escamotées. La
campagne a été essentiellement populiste. En dehors des simplifications
outrancières du populisme, cette approche politique se caractérise par la mise
en scène des conflits réels en une représentation : celle de la lutte du
peuple, incarné par son chef, contre un groupe social honni :
l’oligarchie, la finance, les média, la gauche, les technocrates, les juges,
les intellectuels, les bien pensants, les bobos, les étrangers, les musulmans,
l’Europe, l’Allemagne, ….. . A chacun son ennemi. On pourra bien sûr y
reconnaître les campagnes de François Fillon, M Le Pen, JL Mélenchon, et dans
une moindre mesure, E. Macron. Cette
lutte du « nous » contre le « eux » est implacable car son
enjeu n’est rien de moins que la survie du peuple. Elle est hystérisée par les
discours, les meetings, les dénonciations qui exacerbent la frustration des
militants et la redirige en haine des ennemis que le chef a désignés. Cette
approche a été théorisée par certains penseurs « post marxistes »
comme Chantal Mouffe, dans la ligne du juriste nazi Carl Schmitt, et appliquée
avec méthode par JL Mélenchon. C’est à mon sens une lourde faute et un obstacle
difficilement surmontable à une union de la gauche écosocialiste.
A ce déferlement de sentiments s’ajoute la confusion née des lamentables
palinodies de la droite et du dévoilement brutal et scandaleux de la nature antisociale
de la direction du PS, et encore s'ajoute la pression du vote utile. C’eût été miracle que, dans ce chaos, une
candidature invoquant l’intelligence collective pût se faire entendre. Benoit
Hamon n’a recueilli que 6,35 % des suffrages.
Peur, frustration, colère et haine. Portrait pas très joli de mon pays.
J’ai pourtant trouvé, à fréquenter les murs hamonistes, d’autres sentiments. En
premier lieu un désir de vie, éveillé par l’énoncé d’une utopie d’émancipation,
le futur désirable. Le désir de vie devient une force de transformation sociale
dès qu’on le reconnait aussi chez ses semblables. Cette capacité de se trouver
soi même chez l’autre, pour laquelle les humains ont de bonnes dispositions
neurologiques, c’est l’empathie, condition préalable de la démocratie.
Alors, 6,35%, c’est plutôt un
espoir, non ?
Pleinement d'accord avec l'analyse. Bravo. Effectivement, le National Populisme développé par Mélenchon s'articule essentiellement sur la dénonciation et l'exclusion. Un tel est un traître, l'autre un oligarque, reprenant les sémantiques du FN, il contribue à sa banalisation. Le dégagisme n'est rien d'autre qu'un poujadisme de gauche. Le souverainisme qu'il défend n'est qu'une construction politique d'ennemie contre lesquels la France devrait se défendre. Si la France doit se défendre, c'est qu'elle est attaquée, la discours guerrier se met en place. Là encore on désigne des rivaux au lieu de partenaires, des rapports de force au lieu de proposition, des capitulations plutôt que des recherche de consensus. C'est d'ailleurs la même stratégie nihiliste et suicidaire que France Insoumise a imposé à la gauche. Tous les partis de gauche y ont été confronté, jusqu'au PC pourtant partenaire historique et soutien actif de la campagne présidentielle de Mélenchon et pourvoyeur principal de ses parrainages. Le dogmatisme de quelques cadres s'exprime pleinement. Jours après jours la véritable nature de ce mouvement transparaît derrière la parure de gauche, se cache en réalité un National Populisme pyramidal pourvu d'une gouvernance doctrinaire et autoritaire.
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